APPALACHIAN TRAIL

journal de marche - mai

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1er mai

 Courte journée pour faire halte au très réputé Mt Harbour Hostel. Endroit sympa, bon lit, ravito cher mais surtout un petit déjeuner digne d'une hôtel 5 étoiles aussi bien en présentation qu'en nourriture dans la partie B&B de l'hostel !  J'en suis au moment où les villes me rebutent, Sur l'AT la fréquence des vues sur des habitations et des routes nous prive du sentiment grisant d'énorme solitude ressentie sur le CDT. Par contre, je suis surpris par le nombre relativement restreint de marcheurs "throughikers" : je pensais rencontrer plus de monde (mais je ne m'en plains pas). Comme je reste parmi les plus rapides, je ne me fixe sur aucun groupe. L'épaule droite commence à me faire souffrir.

 Ça y est, l'été est bien là, des fleurs partout, mais aussi les premières zones humides que je vais apprendre à bien, très bien connaître. Heureusement, elles forment, avec les débris végétaux, une boue peu collante et elles sont (presque) toujours équipées de passages en planches en plus ou moins bon état. Tout de même, c'est parfois un peu acrobatique.

 

 3, 4, 5, 6 mai

 Tranquille. Le chemin est facile, les dénivelés modérés. Petit détour pour aller déguster des pancakes... mais la fatigue de fond s'installe et je vais prendre un zéro à Hampton (ml 428) sans attendre Damascus. L'hostel Boots Off est aussi bien que peu fréquenté. Je longe un lac touristique avec habitations et marinas, bref pas terrible comme vues. Après la journée de repos, je fais 38 km sans mal. Je suis seul dans le shelter mais juste devant, il y a un type équipé de bric et de broc, à la limite du clodo, qui restera dehors toute la nuit avec son chien en dépit de la forte pluie, à ranimer son feu de temps en temps pour se chauffer : pourquoi n'est-il pas venu dans le shelter, mystère. Depuis quelques jours, j'ai le nez bouché : rhume ou allergie ? en tous cas, c'est désagréable pour quelqu’un qui a l'habitude de respirer par le nez.

 

 6 mai

Nez bouché et mal au ventre, grosse pluie en sus, bref pas la joie. Heureusement le chemin est facile et j'arrive à Damascus à 14 h. Long et pénible détour au supermarché situé à l'autre bout de la ville, puis je me réfugie au Standing Bear Inn, cher mais très joli.  Damascus est la ville des Trails days qui rassemblent près de 12.000 personnes dans cette bourgade de 3.000 âmes : la folie à grand renfort de musique tonitruante et de bière, je n'y participerai sûrement pas ! Un excellent dîner, une bonne nuit et un gros petit déjeuner au General Store et c'est reparti par une variante reposante le long de la rivière ; du coup je vais abattre plus de 40 km. Il commence à faire chaud la nuit et j'ai remplacé le sac à viande en thermo par un en soie ; je pense que le sac de couchage va bientôt suivre le même processus.

 

 8 mai

 Un mois sur le chemin et 814 km parcourus. Je suis en avance sur mon planning, je dois donc aller trop vite ! Pas beaucoup de rencontres et surtout des débutants. Beaucoup de dénivelés, dans l'ensemble ni très longs ni très méchants, mais le chemin est souvent lent car mal pavé et ma moyenne en vitesse et kilométrage est inférieure à celles du PCT 2022 (rien à voir avec l'âge, évidemment, heu heu). Les prix ont encore grimpé : en moyenne 30$ pour un lit en dortoir, des chambres à 110-130$ et des repas au resto à 25-30$ : heureusement qu'il y a les shelters gratuits et le camping. Contrairement aux autres trails, je trouve des repas lyophilisés dans tous les magasins de sports ; Bizarrement, il n'y en a jamais dans les épiceries ou supermarchés. Ils sont plus cher (~11$) que des ramens (nouilles chinoises) ou les purées Idaho que j'aime bien aussi, mais tellement meilleurs ! Oups, une chaussure un peu déchirée, recousue au fil dentaire comme d'hab. Le nouveau sac à viande est très bien.

 Gros orage durant la nuit sous la tente, pas de dégâts.

 

9 mai

Je fais un aller-retour à Marion pour le ravito. Ce soir, belle baignade dans la rivière. Les premiers rhododendrons et les mille-pattes omniprésents sur le chemin. Les champignons sur les arbres sont aussi fréquents que beaux

 

10 mai

 L'AT traverse une des rares plaines du parcours, gâchée par les trains et une autoroute des plus bruyante. Café dans un station-service avec un Américain francophone. Pluie vers 14h30, mais l'hostel proche est occupé par un bavard impénitent ("Talking Head," c'est dire) qui me fait fuir. Bivouac humide.

 

11 mai

 Gué facile aux chevilles puis bonne matinée, mais l'après-midi est une horreur : ni moi ni l'horloge n'avancent, le chemin n'est pas si difficile, mais je me traîne, gros coup de pompe là. Le lendemain, pas mieux, même après deux cafés et une heure de repos : j'appelle un shuttle et vais à Parisburg où je prends une chambre (50$) pour 3 nuits : dommage de gâcher des si belles journées mais j'ai besoin de repos. De plus l'épaule droite tire fort. Je trouve une ostéo qui me soigne et me donne la recette miracle : "mettre les oreilles derrière les épaules" Ce sera magique.

 Le resto Happy Hog, très bon, est un exemple de pourquoi j'aime les petites villes américaines : il offre des repas gratuits à ceux qui en ont besoin.

 

15 mai

 Tiens, un Écossais en kilt. Petites pluies, arrêt à 15h30 : bonne idée, d'énormes draches tombent peu après. Le shelter est plein, avec des Russes trop bavards mais pas frileux : deux bonnes heures torse nu après être arrivés trempés !

 

16 mai

 Avec la doudoune sous un genou, je dors mieux. Aujourd'hui, je tombe sur l'une des pires sections à ce jour : un enchaînement ininterrompu de grosses pierres glissantes et agressives. C'est à se demander si on ne va pas abandonner : la prochaine fois, je vais à la plage !

 Vue typique de l'AT, avec trop d'humain dans le paysage pour mon goût.  Rat snake, aussi fréquent qu'inoffensif.

 J'aborde des parties sur de grandes dalles inclinées : amusant avec des chaussures qui accrochent bien, mais lent et fatiguant. Pluie la nuit.

 

18 mai

 Les Dents du Dragon : de la grimpette facile, rigolote. Détour routier pour me ravitailler à une station-service pas terrible. Je demande à Pam, ma correspondante USA, une nouvelle paire de chaussures.

 

19 mai.

 Pressé d'arriver à la ville, je fais 25 Km dans la matinée : la fin est dure. Déjeuner trop copieux, trop rapide => je dois m'accroupir en urgence derrière un mur ! Nuit dans un fort bon motel et gros petit déjeuner le lendemain. Temps splendide : je sors la jupe, enlève la chemise. Un TA nous attend en haut de la côte. Fin de journée au pas de course avec 4 litres d'eau pour avoir une place au shelter : il y a du monde. Les jours suivants, le temps reste beau et moi, je reste en tenue d'été, avec des petits bains quand l'occasion se présente. Plusieurs fois, je prends des routes désertes qui me permettent de regarder autre chose que mes pieds, mais les vues sont limitées. Sur le TA, les trajets vers les villes de ravitaillement se font plutôt avec des shuttles payants qu'en stop, qui marche assez moyennement.

 

23 Mai.

 Ravissante petite vallée jadis peuplée d'anciens esclaves et journée de 40 km et 2250 m de montée.

 

24 Mai

 Averse à l'aube, je flemmarde. Une troupe de scouts établit son camp sans me déranger, merci. Le lendemain, un TA m'offre un petit déjeuner. Je prends une variante bleue très amusante le long d'un torrent abrupt. En arrivant à Wensborough (en stop) une bretelle de mon sac lâche : je commande un nouveau 50 litres chez Zpacks, ainsi qu'un sac de couchage "quilt" 5° ; mes nouvelles chaussures sont bien là. Un des shelters devait être habité : j'ai le dos plein de morsures, que le frottement du sac n'arrange pas.

 

29 mai

 Je traverse le parc de Shanandoah par une jolie crête facile que je ferai essentiellement sur la route du parc, presque déserte. Très touristique, le parc propose plusieurs restos et j'en profite : je vais même reprendre un peu de poids ! Les shelters sont souvent pleins, avec des jeunes qui font la fête, ce qui n'est pas une bonne recette pour une nuit reposante.