APPALACHIAN TRAIL

journal de marche - juillet

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1er août.

Il y a des gens bizarres : ce soir, je rencontre une fille dans le shelter : elle marche avec son pigeon apprivoisé qui dort avec elle dans son sac de couchage ! Petite forme ce matin très humide, boueux. Arrivé à la route, mon téléphone n'est plus là : grosse peur, mais il n'était tombé qu'à quelques mètres et je retrouve vite : heureusement que les premières voitures ne m'ont pas pris. 45 mn d'attente pour le stop vers Rangeley (ravito, repas) puis retour au trail en shuttle.

 

 2 août

 Longue et magnifique journée sur des crêtes granitiques dégagées, avec des vues lointaines et de beaux parterres de plantes d'altitude colorées. Pas mal de marais dans les creux, un gué les jambes dans l'eau et un chemin pierreux encombré aussi de racines, mais je commence à avoir l'habitude de marcher en sautant d'une pierre à l'autre.

 C'est curieux mais dans l'ensemble, je dors mal malgré - ou à cause - de la fatigue, avec l'impression de ne jamais trouver la bonne position : les muscles durcis par les efforts du jour mettent des heures à se détendre suffisamment pour autoriser une position confortable, même avec la doudoune sous un genou pour équilibrer les tensions.

 

3 & 4 août

 Grosses montées, grosses descentes et un temps lourd : je transpire à grosses gouttes bien qu'en kilt uniquement. Un hiker me dit que l'étape suivante peut se faire en slackpaking, c-a-d sans sac : j'en profiterai. Arrêt au très luxueux Maine Hostel. Dans le Maine, 3 Km/h, c'est déjà rapide. Le lendemain, orage sur le crête juste quand j'y suis : je laisse passer le plus gros sous un maigre abri mais décide d'éviter la dernière crête et descend par une belle trace déserte.

 

5 & 6 août

 Chemin facile, agréable. Je mets tout de même le pied dans un bourbier. Le soir, partage d'un plat de nouilles offert par le gardien du refuge voisin. Le lendemain, passage en canoë de la Kennebec River. Toujours beaucoup de mares de boue et de saut de bouts de bois en bouts de bois.

 

7 août

 Beau temps. Je contourne le seul sommet de la journée et me trompe de chemin juste au moment où je me disais qu'il est facile de naviguer à l'instinct ! Deux gués pieds mouillés, dont un aux genoux; Tout cela est facile mais c'est une journée "sans" : je trébuche sur tout, j'ai la tête lourde et ailleurs. Je m'arrête à 13h30 et dort toute l'après-midi comme une masse.

 

8 août

 Quatre mois sur l'AT, mile 2082. Moustiques cette nuit. Journée facile et arrêt à Mooson, chez Shaws, comme tout le monde. Très bon ravito, chambres, et prévisions de dépose bouffe pour traverser les "100 miles wilderness" où il n'y a rien. Le 9, il pleut à torrent toute la journée et toute la nuit : les rivières sont en crue, les gués impassables, il faut attendre.

 

11 août

 Le niveau de l'eau a un peu baissé, je peux repartir à condition d'éviter le premier gué. La douloureuse pour ces 3 nuits et la dépose bouffe est salée, mais pas le choix. Beaucoup de boue, mais moins que redouté. Je réussis à me tromper et fais le tour complet d'un sommet pour repartir dans l'autre sens, grrr. Heureusement, deux marcheurs me remettent dans la bonne direction. Pour une fois, je campe seul.

 Les jours suivants, alternance de chemins faciles où l'on croit les épreuves finies et de zones humides ou pierreuses. Quelques gués aux genoux sans risques. Je commence à envisager la fin de l'Appalachian ... avec un certain plaisir.

 

15 août

 J'arrive à Abol Bridge, dernière étape avec le Mt Katahdin. L'endroit est désagréable, mal fourni et cher, mais c'est le seul. Le 16, lever à 5h30 pour aller réserver une place réputée rare au camp de Bridges ; c'était inutile, nous ne sommes pas si nombreux. Très jolie montée le long de torrents jusqu'au dernier shelter de l'AT.

 

17 août.

 Départ à 5h30. Beau temps, mais atmosphère voilée par les fumées d'incendies. Le sentier, d'abord "normal", se redresse et devient de l'escalade dans de gros blocs de granit, puis atteint un plateau humide d'où l'on aperçoit le sommet, peu impressionnant. Photo souvenir obligatoire. Descente raide mais facile, puis shuttle, hostel, bus et avion pour rejoindre ma femme chez une cousine, au Canada.

 

18 août : ça y est, j'ai décroché la triple couronne !